• Les carambars à la récré

     

    Pour en savoir plus sur la pédagogie Freinet : site ICEM-Pédagogie Freinet

     

    LES CARAMBARS DE LA RECRE

    Une école de Village en Pedagogie FREINET dans les années 60

     

    Préface de François LE MENAHEZE 

     

    L’éducation des enfants, des jeunes, et à fortiori l’enseignement, se perpétue à travers les âges à force de principes fort louables. Mais, comme toute action liée à l’être humain, elle ne peut se satisfaire de fondements, programmes, institutions… Elle engage en effet l’avenir d’enfants, la formation de femmes et d’hommes, la construction des citoyens de demain.

    Depuis des siècles, nombre de « penseurs » ont justement tenté de réfléchir au sens à donner à l’éducation, à l’enseignement. Plus récemment, les Mouvements d’Education Nouvelle à l’instar de Célestin Freinet, ont poursuivi sur cette voie. Ils ont su pénétrer ce monde si clos de l’Ecole, non seulement en y insérant une réflexion nouvelle sur la place de l’enfant, mais en y apportant de vrais moyens d’action, d’expérimentation. La brèche ouverte est devenue sillon et, malgré nombre d’embûches, cette voie a laissé une trace indélébile dans le monde de l’éducation.

    Cette école de la compétition, de l’omnipotence du maître-magister, de l’assouvissement de l’élève, n’est plus devenue la seule voie uniforme. Elle a d’ailleurs largement montré ses limites à travers la prégnance de l’échec scolaire et de la violence quotidienne dans les établissements. La prise de conscience qui se poursuit dans ce monde marqué par les traditions a ouvert la voie à une véritable école populaire, une école qui peut offrir une reconnaissance, une véritable place à tous les enfants, une école du travail vrai, de la coopération, de l’émancipation. Ces idées ont maintenant pris corps dans l’école d’aujourd’hui, on le voit à travers la loi d’orientation de 1989, l’évolution des derniers programmes et instructions officielles.

    Les carambars à la récré   Les démarches éducatives ancrées sur le monde d’aujourd’hui      et  impulsées par des pédagogues soi-disant révolutionnaires ont été renforcées par les dernières recherches en sciences de l’éducation et en psychologie. Car, en effet, des réponses existent, les expériences en la matière sont nombreuses, des milliers d’éducateurs, d’équipes à travers le monde ont pris cette voie. Le mouvement Freinet a ouvert des pistes en apportant une place essentielle

    -à l’expression de l’enfant, à sa force créative ;

    -à un travail qui prend sens à travers la découverte quotidienne du monde, un accès de tous à la culture ;

    -à une communication au sein du groupe-classe qui engage à vivre la coopération, à construire une citoyenneté ancrée sur une pratique réelle.

    Ces innovations restent encore malheureusement minoritaires, les freins institutionnels sont nombreux. Ce n’est évidemment pas une nouvelle loi d’orientation, sortie de peudo-débats et impulsée par une frange politique ancrée sur ses traditions et ses pouvoirs, qui va améliorer la situation de notre Ecole du XXIème siècle. Il n’est plus question ni de suivre une société bien pensante fondée sur nombre d’inégalités et l’emprise des élites, ni de prolonger une école de la compétition, de la norme et de l’uniformisation

    Il s’agit au contraire maintenant de construire une réelle éducation forte de sensible, de culture, d’épanouissement à travers le travail vrai et la culture pour tous. Nous devons œuvrer à une véritable école populaire fondée sur des femmes et des hommes acteurs de leur vie, autonomes et responsables mais aussi créateurs de solidarités.

    C’est vers ce vrai sens de l’apprentissage de la vie que s’oriente cet ouvrage. Les histoires et souvenirs d’enfance qui apparaissent au fil de la lecture nous montrent de merveilleux souvenirs d’enfance et de scolarité

    Un témoignage certes dérangeant pour les esprits bien-pensants, les bienséances institutionnelles, mais un récit de vie qui apporte par le biais d’un écriture sensible, politique un regard décapant et pertinent sur l’Ecole d’aujourd’hui.

    Un récit de vie ancré dans la mémoire vive d’un être humain, là est la pari passionnant de cet ouvrage.

     

    François Le Ménahèze Les carambars à la récré

     

       Carambars, bubbles-gums, malabars mistrals gagnants, bois fumants, escargots de réglisse avec la perle, berlingots… les mots chantent sous la plume comme ils fondaient hier dans la bouche. Si la nostalgie guette chaque fois que l’on évoque les verts pâturages de l’enfance, c’est que l’on n’est pas complètement perverti par la logique implacable du virtuel, qu’on a résisté aux ondes de chocs du tout informatique ou qu’on a gardé sous la pédale quelques sentiments ma foi fort honorables.

    Ce livre au départ portait le joli nom d’"œuvre au bleu", pour bien montrer qu’il y a dans la pratique pédagogique une sorte de transformation de la matière première (ce que les alchimistes appellent la prima matera) en une substance beaucoup plus noble, proche de l’or philosophal ! Le bleu étant pris dans son acceptation d’apprenti (l’arpète !), mais aussi de la mode vestimentaire propre au travail ! Le pédagogue (quel vilain mot !) est donc ce magicien qui va réussir à transformer un fort des halles non pas en fort en thèmes, mais en un être sensible, ouvert aux quatre vents de la connaissance.

     

    C’est une expérience que raconte ce livre, celle, en milieu rural, d’une double classe, transcendée par deux instituteurs hors du commun. Un couple, Jean et Simone, proche des milieux Freinet, a réussi dans les années 1960 à sublimer des natures rebelles, petits coqs de village, égoïstes et turbulents, sinon pour en faire des lumières brillant au fronton de l’humanité reconnaissante, mais plus simplement des hommes dignes de ce nom ! Leur réussite est exemplaire même si ce livre qui leur est consacré se refuse à être une hagiographie banalisée par un temps passé qui rend tout et tous beaux et gentils.

     

    Dans le débat actuel sur l’école de la République, au milieu d’un malaise profond et qui n’est pas près de s’apaiser, cet ouvrage écrit sous la forme d’un roman de la vie, veut porter témoignage ! Oui la sapience a encore du sens ; oui la belle sentence reste vraie qui dit que quand une école s’ouvre, c’est une prison que l’on ferme ! Oui il faut aimer et défendre l’école et ne pas la traiter en mendiante de la République ! Oui, il faut revoir les choix politiques qui ne font plus du budget de l’éducation le premier de la nation.

     

    Le livre dessine une ligne continue d’un Présent à se réapproprier à un Futur incertain, en passant par l’Imparfait de l’apprenti, le Passé Simple des premières actions et le Passé (re)Composé de l’homme en devenir. Mais plus que cela… cet ouvrage n’occulte pas les problèmes actuels de l’éducation. Il prend ainsi parfois les allures d’un pamphlet dans le contexte d’une mondialisation néo-libérale qui va et veut gommer toutes les différences. Pourquoi le cacher ? L’auteur n’est pas neutre dans cette affaire. Il a été acteur et veut aujourd’hui témoigner. C’est de notre avenir dont il s’agit et de notre propre capacité à surmonter nos difficultés actuelles. Oui le débat est essentiel… Voilà ma petite et modeste contribution.

     

     Les Carambars de la Récré ! Une école de village en Pédagogie Freinet dans les années 60 fait partie du cycle Territoire de Serpent dont le premier ouvrage Libre enfant de Favières en 1998 a également été édité par L'Harmattan dans sa collection Histoire de Vie que dirige Gaston Pineau. Cet ouvrage se lit comme un roman et pourtant il prolonge la réflexion autour du thème de notre école, celle qui forme des hommes et non des robots au service de la machine.

     de Guy-Joseph Feller